La première console de jeu NFT et Web 3 : Rêve éveillé ou bouffée délirante ?

Prudence est mère de sûreté – Quel crypto-joueur ne rêverait pas de pouvoir utiliser son NFT préféré sur son jeu vidéo favori ? La société Polium, créatrice d’infrastructures web 3 pour les jeux blockchains tente l’aventure et annonce développer la console du futur : Polium One. Interopérabilité entre les blockchains, gains pour les détenteurs, NFT, revenus passifs, métavers… : la console du futur déborde de promesses. A priori, tout semble parfait. Ce n’est sans compter l’adage crypto DYOR, Do Your Own Research (faites vos propres recherches) qui nous rappelle l’importance de faire une levée de doute face à un projet aussi alléchant. Décryptons.

Jeu NFT et web 3 : une console qui en ferait rêver plus d’un

Au début du mois de juillet, nous apprenions que la société Polium exposait son projet de console Polium One. Ce modèle est alors annoncé comme révolutionnaire, car compatible avec des NFT et adaptable à des métavers sur la DeFi, tels que Decentraland.

Présenté comme compatible avec 8 blockchains (Ethereum, Solana, Polygon, BNB Chain, ImmutableX, Harmony, EOS et WAX), la console disposerait de sa cryptomonnaie propre (son jeton natif PLAY), d’une marketplace ainsi que de son portefeuille numérique.

Côté technique, peu d’informations sont disponibles. Apparemment, les résolutions 4K ou 8 K Ultra HD 120 images par seconde sont disponibles au choix. La manette promet d’avoir plusieurs fonctionnalités à première vue intéressantes :

• Un bouton portefeuille pour faciliter les transactions (permises grâce au jeton PLAY) ;
• Un scanner d’empreintes digitales pour optimiser la sécurité de l’appareil.

Pour obtenir la console, il faudra avoir un Polium Pass NFT. 10 000 de ces pass seront mintés (créés) pour les premiers pas de cette console dans l’écosystème. Le prix du mint est inconnu pour le moment. Pour la suite, la société prévoit de vendre 1 million de consoles 3.0 et mise donc sur l’accessibilité pour élargir son public à celui du gaming.

« La console sera suffisamment puissante pour exécuter des jeux à hautes performances et sera facile à utiliser pour un joueur traditionnel qui ne comprend pas le web 3. »

Déclaration de Polium

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Polium One, le mirage de la console web 3.0

Rapidement, les critiques ont cependant commencé à pleuvoir. La console a notamment été moquée pour sa ressemblance exagérée avec la Nintendo GameCube. Dans le milieu du gaming, l’accueil a également été très mitigé.

Par ailleurs, le manque de professionnalisme de ce projet émergent s’est fait remarquer sur son discord. Absence de modération, questionnement de la communauté sur le fait que le projet soit un scam : les ingrédients semblent réunis pour que nous décidions d’enquêter.

D’abord, nous nous sommes attaqués à cette histoire de logo et de ressemblance avec la GameCube. Sur les réseaux sociaux ouverts le 2 juillet, nous avons alors trouvé ce tweet datant du 4 juillet.

« Nous n’avons pas copié le logo GameCube de Nintendo. Plusieurs entreprises utilisent un logo similaire. Mais nous allons concevoir un nouveau logo original. »

Tweet de Polium

On sait à quel point point le branding (et plus particulièrement le logo) ont une importance stratégique en matière de marketing. À ce titre, cette histoire, à première vue sans gravité, peut tout même être interprétée comme le premier symptôme d’un projet bancal.

Par ailleurs, la RoadMap questionne. Floue et sans date vraiment précise, celle-ci dessine pourtant la route à suivre pour le projet. Véritable colonne vertébrale, elle est traditionnellement déterminante pour les investisseurs et encore plus dans le cas d’un projet industriel de ce type. Force étant de rappeler qu’au-delà du contexte crypto-économique et macro-économique délicats, rythmés par l’augmentation syncopée de l‘inflation, la création et l’industrialisation d’une console à grande échelle représentent un travail de titan qui nécessite des années et des milliards de dollars. La PlayStation 5, dernier petit bijou de Sony, a ainsi été conceptualisée dès 2015. Le projet a donc eu besoin de plus de six ans pour mettre sa console en vente, de manière limitée comme on le sait. Elle a, d’ailleurs, été très rapidement victime de son succès.

Un livre blanc qui fait broyer du noir

Notre rêverie s’est ensuite transformée en une sorte de cauchemar. Errant sur le site, nous avons atterri sur le white paper (livre blanc). Nous l’avons lu. Mauvaise idée. D’emblée, le papier – censé être – sacré nous informe :

« Ce livre blanc est destiné à un lecteur avec une formation non technique. Nous créons actuellement un livre blanc avec plus de détails techniques, qui sera bientôt publié sur notre site web. »

Bon. Soit. Avançons. Le white paper décrit ensuite, brièvement, le site internet en reprenant la majorité des informations… du site internet. Aucune notion n’est développée concernant les services proposés sur le wallet de cryptomonnaies. Les rewards de jeton PLAY associés aux NFT sont évoqués brièvement et le terme « staking » apparait une fois au détour d’une liste à puces.

L’analyse de marché sur les millions de potentiels utilisateurs fait, elle aussi, rêver, mais elle ne cite pas de source. Les chiffres et les statistiques pour l’avenir ressemblent ainsi à de vulgaires prémonitions de comptoir. Le white paper se conclut enfin en reprenant la foire aux questions (FAQ) utilisée sur le site internet.

En enquêtant ne serait-ce qu’un peu, il apparaît donc curieux qu’un projet aussi peu abouti – en tout cas pour le moment – ait pu faire couler autant d’encre. Sur le papier, certes la console fait rêver. NFT, metaverse, web 3 et cryptomonnaies : Polium surfe sur les ingrédients qui rendent l’univers de la blockchain séduisant. En revanche, l’absence de CEO derrière le projet ou autre représentant nous laisse dubitatifs. Démarche honnête ou projet douteux ? Quoi qu’il en soit, cette console est là pour nous rappeler l’importance de faire ses propres recherches pour éviter les pièges du web 3.

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