Le manque de confidentialité est LE défaut de Bitcoin selon Antonopoulos

Andreas Antonopoulos, conférencier, auteur, codeur et entrepreneur, est connu pour être l’un des plus fervents défenseurs de Bitcoin et avoir contribué largement à sa diffusion auprès du grand public. Dans une récente interview, il a appelé à plus de confidentialité sur le réseau Bitcoin et a vivement critiqué la société d’analyse de blockchain Chainalysis.

Samedi 25 avril, Andreas Antonopoulos était l’invité de Lark Davis pour son podcast YouTube « The Crypto Lark« . Durant les 25 minutes de cet entretien, il a pu s’exprimer sur Bitcoin, ses qualités, ses défauts et son avenir.

Andreas Antonopoulos

La vraie mission de Bitcoin

Selon le Bitcoin-evangelist, il y a deux camps au sein des utilisateurs de Bitcoin :

  • Les premiers le considèrent selon une perspective monétariste. La cryptomonnaie est pour eux une valeur refuge, grâce à sa quantité limitée et à sa faible inflation ;
  • Les seconds considèrent Bitcoin comme une monnaie internationale, ouverte, neutre politiquement et accessible aux non-bancarisés, créant ainsi une meilleure inclusion financière.

Andreas Antonopoulos se place clairement dans le second camp, et ne joue pas au devin quant à l’avenir de l’économie mondiale actuelle. Il est impossible pour lui de prédire si nous nous dirigeons vers l’hyperinflation, la déflation ou la stagflation. La plus folle expérience monétaire, nous dit-il, ce n’est pas Bitcoin : il s’agit du quantitative easing infini des banques centrales. Il rappelle que cela n’a jamais été vu dans l’Histoire, et qu’il est donc impossible de prédire quels effets ces conditions économiques dangereuses auront sur le monde.

Les monnaies numériques de banques centrales

Pour Antonopoulos, Libra ou les CBDC/MDBC n’auront aucun effet sur Bitcoin et ces dernières ne l’intéressent pas. Elles ne sont pas différentes du dollar et ne possèdent pas les propriétés uniques de Bitcoin, qui est immuable, collaboratif, public, ouvert, résistant à la censure et décentralisé.

Euro numérique - MNBC - CBDC-1

Il les voit comme des outils de surveillance financière et pointe du doigt leur dangerosité : leur but avoué est la disparition de l’argent liquide.

« Le problème est que, si vous donnez à des institutions centralisées le contrôle sur quelque chose d’aussi important que la monnaie dans une société, alors elles peuvent utiliser ce pouvoir pour écraser toute opposition. Elles vont commencer à décider qui sont les gagnants et qui sont les perdants, et elles peuvent exclure n’importe qui. Avoir la capacité de décider qui peut acheter de la nourriture en changeant un bit dans une base de données, c’est un monde très effrayant. »

Cette politique financière totalitaire nous place selon lui face à un choix : celui d’utiliser ou non des monnaies décentralisées. Selon Antonopoulos, qu’un pays utilise un registre public (dans le cas des CBDC) ou pas est hors sujet : ce qui est important, c’est que les gens aient le choix entre plusieurs monnaies, et puissent avoir accès à une alternative à la monnaie centralisée. Il est important d’avoir un marché libre et ouvert pour les devises, conférant une plus grande liberté.

Bitcoin et la confidentialité des transactions

Le manque de confidentialité et d’anonymat est pour Antonopoulos le défaut majeur de Bitcoin. Il ne vient pas des développeurs eux-mêmes, mais des opérateurs de services.

« Les entreprises telles que Chainalysis et autres se sont lancées dans une course à l’armement contre la vie privée. Et ce qu’elles font, c’est fournir aux pires dictateurs et régimes du monde, directement ou indirectement, des informations qui violent les droits civils de millions de personnes. »

« Il est fondamentalement immoral de travailler pour une telle société, tout comme je considérerais immoral de travailler pour un fabricant d’armes ou une entreprise qui construit des cages pour des camps de concentration. »

Chainalysis

Plutôt virulent, n’est-ce pas ? On ne sait pas à quels régimes totalitaires Antonopoulos fait ici allusion… Jonathan Levin, co-fondateur et CSO de Chainalysis, n’a pas particulièrement apprécié sa tirade. Il assure que « comme règle générale, Chainalysis ne travaille pas avec des gouvernements dictatoriaux. » Il ajoute que pour lui, la conformité réglementaire est essentielle à l’adoption de Bitcoin.

Nous pouvons donc voir se détacher deux positions distinctes au sein de la cryptosphère :

  • D’un côté, ceux qui voient l’absence de réglementation comme un frein à l’adoption (et donc à la profitabilité de leur business) ;
  • De l’autre, les cypherpunks des origines, qui n’ont aucune confiance en ceux qui font les lois ou en ceux qui les appliquent. Ils souhaitent que Bitcoin reste résistant à la censure, ce qui passe par l’anonymat.

L’avenir pour Bitcoin

Pour Antonopoulos, il existe heureusement des technologies et des fonctionnalités qui permettront de rendre à Bitcoin sa confidentialité perdue : il cite notamment les signatures de Schnorr, taproot et tapescript.

La recherche fondamentale en cryptographie est dopée par Bitcoin; les progrès de ces deux dernières années sont immenses. Il en veut pour preuve l’évolution de la recherche sur les preuves à divulgation nulle de connaissance, qui permettent d’assurer l’anonymat des transactions et vont à son sens révolutionner la finance décentralisée.

Quant au halving, il prévoit beaucoup de volatilité sur le court terme. Les utilisateurs de Bitcoin vont être émotifs et cela se ressentira sur leur trading.

Bitcoin Inflation
Courbe d’émission des bitcoins et courbe d’inflation.

Il se veut rassurant sur les effets qui ont pu être observés sur certains forks de Bitcoin. Une partie des mineurs, pouvant miner une cryptomonnaie plus rentable avec le même matériel, se sont détournés de ces réseaux, les rendant extrêmement vulnérables. Bitcoin est déjà la cryptomonnaie la plus rentable à miner pour un certain type de matériel (les ASIC), et le halving ne va pas changer cela.

Quant aux effets sur le prix, la demande en bitcoins est déjà forte et c’est plutôt la création monétaire effrénée des banques centrales qui l’augmentera, pas nécessairement la réduction de la récompense de bloc.

Au long terme, il reste convaincu qu’il y aura sur le réseau Bitcoin plus de transactions, avec plus de frais; ces derniers viendront progressivement se substituer aux récompenses de bloc.

« Ironiquement, l’histoire de « Bitcoin est-il mort ? » est l’un de nos plus grands succès marketing, car chaque fois que quelqu’un entend qu’il n’est pas encore mort, cela crée un peu de dissonance cognitive dans son esprit, et il se rend compte que cette chose est plutôt résistante… » Andreas Antonopoulos

Images : gualtiero boffi/Shutterstock.com, Wikipédia

Morgan Phuc

Cofounder @ 8Decimals - Partner @ Node Guardians - Journal du Coin / Trading du Coin / BitConseil