Y voir plus clair dans son investissement - Avec de plus en plus de projets voyant le jour dans l'écosystème, il est bon de savoir ce que sont les White Papers et de savoir comment ces derniers sont rédigés. Devant permettre la compréhension d'un projet et la vision de son auteur, savoir déchiffrer un White Paper est primordial pour un investisseur dans l'écosystème crypto. Malheureusement, ils sont de plus en plus long, détaillés et, de facto, compliqués à déchiffrer.
Livre blanc, White Paper, une rapide définition
Un White Paper (ou livre blanc) est un document d'expertise, de littérature grise (documents produits par une administration, une industrie, une ONG, etc et qui ne sont pas issus d'éditeurs commerciaux). Le premier White Paper a été écrit par Winston Churchill le 3 juin 1922. Il devait présenter la vision du gouvernement Britannique concernant la Déclaration du Balfour. Un White Paper prend généralement la forme d'un rapport présentant les informations nécessaires à la bonne compréhension du sujet traité en expliquant la philosophie de son auteur.
On peut définir deux types de White Paper :
- Le premier type de White Paper est un document rédigé par un gouvernement ou un organisme officiel. Cela peut-être une ONG, une administration publique ou une association. Il est souvent long et complexe, il aborde la vision d'un gouvernement ou bien explique la stratégie d'une ONG par exemple. La France a publié quatre livres blancs concernant la Défense et la Sécurité Nationale, le dernier datant du 29 Avril 2013. Ce premier type de livre blanc est censé faire preuve d'une certaine objectivité.
- Le deuxième type de livre blanc quant à lui tient du marketing. On parle de B2B (Business to Business), donc une entreprise qui veut vendre son produit ou ses services à une autre entreprise. Ici plus d'objectivité, le but est de présenter une solution, un produit ou un service mis à disposition par celle-ci.
A quoi sert un White Paper dans l'écosystème crypto ?
Dans notre écosystème, le livre blanc est devenu incontournable. Satoshi Nakamoto sort le livre blanc de Bitcoin le 31 Octobre 2008 afin d'expliquer son système de transaction sans tiers de confiance. Maintenant, les projets utilisent le White Paper d'une façon bien plus marketing. En effet, il s'agit d'attirer les investisseurs afin de lever des fonds. Les entreprises présentent leur projet et les avantages que peut en tirer un investisseur dans leur livre blanc. Globalement, il sert à présenter le projet sous tous ses angles, d'un point de vue fondamental comme technique.
Comment est-il rédigé ?
Le White Paper dans son écriture a bien évolué depuis celui de Bitcoin qui fait huit pages. Par exemple, là où Satoshi expliquait toute la technique derrière son projet, Binance y ajoute une partie présentant l'équipe et les investisseurs. On voit bien plus la démarche entrepreneuriale et marketing derrière le WP, on y voit la présentation de l'échange, très détaillée pour pouvoir convaincre des futurs utilisateurs. S'en suit la description de la tokenomics [Economie liée aux tokens], avec les détails d'allocations, l'équipe et les investisseurs et enfin les risques.
Le livre blanc de Binance nous présente donc de nouvelles parties qui ne sont pas présentes dans celui de Bitcoin. Cela est-il réellement mieux et plus précis ? Ce qui est sûr c'est qu'il est visible que ce White Paper s'inscrit dans une démarche complètement marketing. Il n'est maintenant pas rare de voir dans un White Paper, plusieurs dizaines de pages et toujours plus de sous-parties. Globalement nous retrouvons tout d'une présentation de projet à des investisseurs: problème, solution envisagée, économie liée aux tokens, type de financement envisagé, partenaires présents, présentation de l'équipe et généralement un délai pour y parvenir.
Que faut-il retenir d'un White Paper ?
Ce qu'il faut retenir d'un livre blanc va dépendre des intentions de l'auteur. Si l'on regarde le livre blanc de Bitcoin ou encore celui d'Ethereum nous voyons que le but et la philosophie de l'auteur est de présenter une solution technique à un problème. Pas de présentation d'équipe, pas de présentation d'investisseurs. Dans ces cas précis il s'agit de comprendre la technique présente derrière ces lignes. On se rapproche plus d'un livre blanc de type organisme publique. Le White Paper est objectif et présente uniquement la solution envisagée pour un problème.
Pour un White Paper plus axé sur le marketing, comme celui de Binance, alors il faut regarder plusieurs points. Il sera sans doute moins fastidieux à lire qu'un livre blanc axé complètement sur la technique. En revanche il ne faut pas oublier qu'il est écrit pour vendre un produit ou un service. Il faut donc prendre du recul en le lisant et étudier chaque partie avec soin. Voyons un peu ce qu'il y a retenir dans chaque partie:
- Problème: l'auteur pose un problème, pour montrer qu'il va y répondre. Celui-ci doit être correctement explicité. Si vous ne le comprenez pas alors penchez vous plus en détail dessus sinon vous ne comprendrez sans doute pas les solutions mises en place.
- Solution envisagée: ici il faudra sans doute un peu de compétence technique. Encore une fois il faut garder du recul sur la lecture des solutions proposées: sont-elles réalistes et réalisables ? Contiennent-elles des risques ? Si oui, lesquels ? Si déjà les parties problème/solution vous semblent clairs nous sommes sur la bonne voie.
- La tokenomic: une tokenomic peut être difficile à comprendre, n'hésitez pas à demander autour de vous si vous éprouvez des difficultés à comprendre certains termes ou certains processus. Certaines choses sont tout de même importantes si des tokens sont présents dans le projet que l'on vous propose. Tout d'abord, pour éviter toute manipulation de la team, il faut savoir si celle ci détient des tokens du projet. Ceux-ci sont-ils verrouillés pendant un certains temps ou pas ? Combien de temps ? Ensuite, il s'agit de regarder plusieurs choses comme les frais imposés au consommateurs, le côté plus ou moins inflationniste de cette économie, etc.
- Le type de financement envisagé: c'est également une partie importante. L'investissement sera-t-il fait via une levée de fond ouverte aux particuliers ? Ou seulement aux fonds d'investissements et autres entités institutionnelles ? Ou bien les deux peut-être ? Dans les deux derniers cas il sera bon de savoir qui sont les investisseurs derrière le projet. Binance dans son cas a une partie dédiée à ses investisseurs.
- L'équipe: un des points les plus importants dans le cadre d'un White Paper axé marketing. En effet, dans le livre blanc de Bitcoin, présenté par Satoshi Nakamoto, on ne connaît pas l'identité de ce dernier mais cela importe peu puisqu'il nous présente la technique permettant à Bitcoin de fonctionner. Il n'y a aucune idée marketing derrière. Dans l'autre cas il ne faut pas oublier que le projet en question va vous demander une contrepartie (sous la forme de votre investissement) il vous faut donc connaître les personnes derrière le projet. Donneriez vous de l'argent à quelqu'un d'inconnu ?
- Le délai: ce qu'on appelle plus communément la Roadmap [feuille de route] dans l'écosystème est également un point important. Elle montre si l'équipe du projet ne voit pas trop grand. Il faudra par exemple se méfier d'un projet qui veut vous pondre un jeu vidéo (comme un Play 2 Earn) en huit mois avec une équipe de 4 dont un seul dev. La Roadmap doit être réaliste.
«L'important n'est pas de savoir lire mais de savoir ce qu'on lit, de raisonner sur ce qu'on lit, d'exercer un esprit critique sur la lecture. En dehors de cela, la lecture n'a aucun sens.»
- Jacques Ellul
Un livre blanc a-t-il une valeur juridique ? Quels sont les risques ?
Attention cependant. Un livre blanc n'est qu'une présentation du projet du point de vue de celui qui l'écrit. En cryptomonnaies, un livre blanc n'a aucune valeur juridique. C'est bien pour cela qu'il faut éplucher le White Paper et creuser plus loin que ce dernier. En cas d'arnaques, ou de non délivrance des éléments présents à l'intérieur, vous ne pourrez pas vous retourner en utilisant son contenu. C'est pourquoi, il faut se renseigner sur tous les points évoqués plus haut. N'hésitez pas à chercher des informations sur l'équipe du projet et si un smart-contract existe déjà demandez l'adresse de ce dernier par exemple. Le White Paper doit en réalité vous servir à commencer vos vraies recherches en tant qu'investisseur.
Un White Paper mal rédigé ou incomplet sera aussi dommageable pour l'entreprise ou le projet. En effet, si votre livre blanc est confus, les investisseurs n'auront pas confiance. Et un investisseur qui n'a pas confiance n'investit pas. C'est pourquoi il faut vous efforcer de mettre toutes les informations possibles dans votre White Paper. Plus ce sera clair pour l'investisseur plus celui sera enclin à investir dans votre projet. Ne soyez pas non plus trop gourmand dans votre livre blanc. Mieux vaut rajouter des fonctionnalités à un projet que de promettre la lune et de délivrer un gravier. Soyez sérieux, réalistes et expliquez du mieux possible votre projet. Un White Paper sérieux montre tout de suite que vous n'êtes pas là juste pour faire de l'argent.
Il faut également rappeler qu'un White Paper très bien rédigé, très sérieux et très réaliste n'exclut absolument pas une arnaque. Comme énoncé plus haut, un White Paper n'a aucune valeur juridique car il est à titre informatif. D'où la nécessité de lancer des recherches approfondies et même avec celles-ci, rien ne vous dit que l'équipe du projet ne va pas partir avec la caisse, ou simplement se planter d'ailleurs.
Le White Paper ou livre blanc est incontournable dans l'écosystème, d'un point de vue investisseur comme porteur de projet. Là où Bitcoin présentait un White Paper anonyme qui présentait les enjeux et la technique derrière Bitcoin, les livres blancs de nos jours, bien plus axé Marketing se doivent d'apporter des précisions supplémentaires. D'un côté il informe sur les valeurs et les objectifs d'un projet, de l'autre il permet d'acquérir la confiance d'investisseurs afin de mener à bien des objectifs lancés par une entreprise. Plusieurs parties sont à étudier afin de bien comprendre les enjeux apportés par un projet. Il est cependant bon de noter que même avec les meilleures recherches du monde et la meilleure connaissance du projet possible il n'est jamais possible d'être sûr à 100%. Que le projet soit fait pour être une arnaque ou qu'il n'arrive simplement pas au bout, la limite est fine. Et en général dans les deux cas l'investissement sera perdu. Soyez prudent et n'investissez que ce que vous pouvez vous permettre de perdre.