Maintenant que vous connaissez Bitcoin, penchons-nous sur la seconde blockchain la plus connue de l'industrie : Ethereum. Si vous avez lu l'article précédent, vous avez déjà une idée de ce dont il s'agit. Mais qui est derrière cette invention ? Qu’est-ce qui a conduit à sa création ? De quoi s'agit-il et qu'est-ce que ça change ? Avant de nous plonger dans l'aspect technique des choses, voyons tout d'abord pourquoi et comment est né Ethereum, ainsi que les idéaux et les hommes qui se cachent derrière cette blockchain.
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Table des matières
Vitalik Buterin : un gamer et Bitcoiner déçu
Un surdoué frustré par le système
Trêve de suspense (qui n'aura pas duré), Vitalik Buterin est l'homme qui a pensé Ethereum. Contrairement à Satoshi Nakamoto, il n'est pas anonyme, et est même très célèbre. Pour comprendre d'où vient son invention, nous devons nous pencher sur sa vie.
Vitalik Buterin est né en Russie en 1994, avant d'immigrer au Canada avec ses parents à l'âge de six ans. Il démontre très tôt un talent supérieur à la moyenne pour les chiffres et la programmation, et un intérêt par les mathématiques et l'économie.
Plus attiré par les ordinateurs que par les gens, il passe de nombreuses heures derrière son PC et se passionne notamment pour World Of Warcraft (WoW), jeu en ligne auquel il jouera assidûment de 2007 à 2010.
Bien que cette information puisse paraître triviale, il semble pourtant que ce soit le point de départ de la réflexion du jeune génie sur Ethereum. En effet, sans crier gare, ni consulter sa communauté de joueur, Blizzard (la maison d'édition de WoW) sort un patch en 2009 qui annule l’une des compétences du personnage de Vitalik, le rendant ainsi beaucoup moins puissant qu'il ne l'était.
Ceci crée énormément de frustration chez le jeune joueur, qui avait passé énormément de temps à développer son personnage. Il se pose alors de véritables questions existentielles, notamment sur l'influence néfaste des systèmes centralisés sur la vie des gens (gouvernement, grandes entreprises...). Il a alors 15 ans.
De Bitcoin à Ethereum
À 17 ans (en 2011), c'est son père qui lui parle pour la première de fois Bitcoin qui lui paraît être une innovation technologique intéressante. Si ce n'est pas un déclic immédiat pour Vitalik, il commence néanmoins à se pencher sur le sujet, séduit par ses côtés décentralisé, « trutless » et incensurable.
Au fil de ses recherches, il s'implique de plus en plus dans la communauté et jusqu'à en devenir un membre très actif.
Dés 2011, il contribue ainsi à la rédaction d’articles pour le site Bitcoin Weekly, qui le rémunère 5 BTC par articles (soit l'équivalent de 3.5 dollars US à l'époque). Malheureusement, leur collaboration ne dure pas, le modèle économique du projet n'étant pas viable et le forçant à fermer.
Au mois de septembre de la même année, il est approché par Mihai Alisie, fondateur du Bitcoin Magazine, qui lui propose un poste au sein de son journal. Vitalik accepte, et devient alors cofondateur et premier contributeur du magazine.
Il continue ses études en parallèle mais passe de plus en plus de temps sur l'étude des blockchains et des cryptomonnaies. À force de réflexion, il identifie petit à petit les limites à la blockchain Bitcoin.
Lors d'un voyage en Israel, il rencontre d'autres passionnés de Bitcoin et de blockchain, qui cherchent à utiliser la technologie inventée par Satoshi pour d'autres applications. Les projets Mastercoin et Coloured Coin, qui veulent créer d'autres jetons et déployer des smarts contract, l'inspirent largement. Il comprend rapidement qu'ils pourraient arriver à leurs fins facilement en remplaçant le langage de programmation de Bitcoin par un autre, qui soit plus adapté. L'idée d'Ethereum est née !
Il suggère l’idée aux projets en question, qui préfèrent ne pas y adhérer. Vitalik décide alors de s’en charger lui-même. C'est dans cette optique qu'il écrit en 2013 le livre blanc d'Ethereum, où il amène l’idée de créer une nouvelle blockchain permettant de déployer des contrats intelligents, ouvrant ainsi la porte à des possibilités bien plus poussées que le simple échange de jetons de pair à pair.
Pour la petite histoire, le nom du réseau est trouvé par hasard par Vitalik en surfant sur le web, lorsqu'il consulte un article sur l'ether (ou quintessence) le cinquième élément de l'alchimie qui aide à décrire la diversité de l'univers en plus de feu, de l'eau, de la terre et de l'air.
D’un livre blanc à un projet à plusieurs millions de dollars
La proposition de Vitalik Buterin et son livre blanc connaissent un engouement de plus en plus important auprès de la communauté blockchain. Il monte alors une équipe de 7 personnes dont nous parlerons dans le paragraphe suivant, qui deviennent les cofondateurs du projet.
En janvier 2014, il prononce un discours de 25 minutes lors d'une conférence Bitcoin à Miami où il présente Ethereum comme un ordinateur mondial décentralisé entièrement programmable. Il annonce alors quelques-unes des innovations qui découleront de son invention :
- La Finance Décentralisée (DeFi)
- Les forums de gouvernance (DAO)
- Les exchanges décentralisés
Les cofondateurs se retrouvent 6 mois après la prise de parole, en Suisse, où Vitalik leur annonce sa décision de poursuivre le projet en tant qu'association à but non lucratif. Ils créent alors la Fondation Ethereum et ils mettent en prévente les premiers Ethers (ETH) pour financer le développement du projet. Il s'agit de la deuxième Initial Coin Offering (ICO) du monde (après celle de Mastercoin). Ils parviennent ainsi à réunir 31 591 bitcoins, soit l'équivalent d'environ 18 millions de dollars US à l'époque (avec 60 millions d'Ethers prévendus).
Les cofondateurs du projet
Dans l'optique de faire avancer les choses rapidement, Vitalik regroupe une équipe de gens brillants dont voici la liste.
Vous constaterez en lisant les lignes qui suivent que l'équipe originelle ne restera soudée que très peu de temps. La sélection effectuée par Vitalik fut « trop rapide et sans discernement », comme il le dira plus tard face aux chemins divergents que prendront ses membres.
Ils n'en restent pas moins des personnalités intéressantes, qui ont largement contribué au développement de l'écosystème crypto au sens large.
Mihai Alisie
Nous en avons déjà parlé plus tôt, Mihai Alisie est le cofondateur de Bitcoin Magazine avec qui Vitalik avait déjà collaboré.
Originaire de Roumanie, il étudie la cybernétique, l’informatique économique et les statistiques à l’Université Lucian Blaga de Sibiu et obtient son diplôme en 2010.
Il est le vice-président de la Fondation Ethereum jusqu’en 2015. Après avoir quitté Ethereum, il fonde Akasha, un incubateur de projets blockchain à but non lucratif.
Charles Hoskinson
Charles Hoskinson est un entrepreneur américain né en 1987, qui a joué un rôle clé dans le développement de la technologie blockchain.
Son rôle dans Ethereum fut cependant de courte durée, car quitte l'aventure (ou en est écarté) en 2014 suite à différent avec Vitalik sur l'aspect financier du projet. Il voulait créer une entité commerciale et non pas une organisation à but non lucratif comme la Fondation Ethereum.
Il montera ensuite IOHK (Input Output Hong Kong), une entreprise d’ingénierie et de recherche sur les cryptomonnaies et les blockchains. Il développe alors la blockchain Cardano et son jeton l'ADA.
Garvin Wood
Né en 1980, Gavin Wood est un informaticien britannique titulaire d'un doctorat dans le domaine. C'est lui qui a proposé et développé le langage Solidity qui sert à écrire les contrats intelligents sur Ethereum. Il a également publié le papier définissant la Machine Virtuelle Ethereum (EVM) [METTRE UN LIEN VERS L'ARTICLE].
Il quitte la Fondation Ethereum en 2016, mais reste impliqué dans le projet en créant Parity Technologies qui développera un client pour le réseau Ethereum.
Il fonde aussi la Web3 Foundation, une organisation à but non lucratif à qui on doit la naissance de Polkadot et de Kusama en 2019.
Joseph Lubin
Joseph Lubin est un entrepreneur canadien qui a étudié l’informatique et la robotique à l’Université de Princeton. Plus vieux que le reste de l'équipe, il travaille un temps pour Goldman Sachs avant de quitter la finance traditionnelle après la crise des subprimes pour l'univers des blockchains.
Il fait partie de la Fondation Ethereum jusqu'en 2015, et créer ensuite ConsenSys, entreprise qui développera entre autres le célèbre portefeuille Metamask.
Amir Chetrit
Amir Chetrit est un développeur qui faisait partie de Colored Coins, projet ayant inspiré Vitalik pour Ethereum.
Il reste très peu de temps dans la Fondation et la quitte dès 2014. Très discret, on trouve peu de traces de lui sur le web par rapport aux autres membres de l'équipe.
Jeffrey Wilke
Jeffrey Wilke est un ancien de Mastercoin, que Vitalik rencontre à Amsterdam. Il se joint à la Fondation Ethereum où il développe un client avec le langage Go de Google, appelé « Go Ethereum » puis tout simplement « Geth ».
Comme les autres membres, il ne reste pas longtemps dans le groupe dont il trouve que les membres se font une « guerre d'ego ». En 2018, il fonde Grid Games avec son frère Joey, une société de développement de jeux.
Anthony Di Iorio
Anthony Di Iorio est un entrepreneur canadien qui rejoint le groupe après avoir lu le livre blanc du projet. Il développe des sites internet dès les années 1990, et investi largement dans le bitcoin dès 2012.
Il quitte rapidement la fondation et devient le premier directeur numérique de la Bourse de Toronto et est le fondateur de Decentral Inc., société qui a développé le portefeuille crypto Jaxx.
De l'ICO à la deuxième crypto la plus capitalisée
Bien que l'équipe originelle n'ait duré qu'un temps, elle a su crée assez d'engouement autour du projet pour qu'il puisse continuer à vire sans elle (même si Vitalik reste très actif). Ethereum attire de plus en plus de monde, et le projet est celui qui compte aujourd'hui le plus de développeurs actifs à temps plein (près de 2000).
Les possibilités offertes par la création de Vitalik sont encore loin d'être complètement exploitées. Vous l'avez compris, le projet initial n'était pas de créer une monnaie décentralisée, rôle déjà très bien rempli par Bitcoin.
C'est grâce aux contrats intelligents qu'Ethereum s'est démarqué, les cas d'usage du réseau étant beaucoup plus larges. Même si la finance décentralisée et les NFT y sont déjà bien implantés, leur marge de progression est énorme et le projet est encore loin d'être achevé.
Sa roadmap est d'ailleurs bien chargée, et vous pourrez constater dans l'article qui suit que le réseau a déjà largement évolué tout au long de sa courte existence [METTRE UN LIEN VERS L'ARTICLE].